Refacturation de frais de voiture et limitation de la déduction de la TVA
Quelles règles TVA sont applicables à la refacturation de frais, et pour qui la déduction est-elle limitée en cas de refacturation de frais de voiture ? À quoi être attentif, et qu’a récemment dit le ministre à ce propos ?
I. Refacturer des frais avec ou sans TVA ?
A. Y a-t-il un lien direct avec une livraison ou un service ?
S’il y a une opération principale (donc si vous refacturez certains frais dans le cadre d’une livraison ou d’un service), les frais refacturés suivent le régime TVA de l’opération principale. Si vous devez facturer de la TVA sur l’opération principale, vous devez alors aussi le faire sur les frais refacturés. L’accessoire suit donc le principal.
Cela s’applique peu importe que vous refacturiez ces frais conjointement à l’opération principale ou via une facture distincte (art. 26, §1er, CTVA).
Pour le taux de TVA, là aussi s’applique la règle selon laquelle les frais refacturés sont soumis au même taux de TVA que l’opération principale (même si un autre taux ou une exonération devrait s’appliquer à ces frais).
Exemple : vous donnez en location un entrepôt avec application de la TVA. Vous avez conclu une assurance incendie pour cet entrepôt et refacturez la prime au locataire. La refacturation de cette prime se fait avec 21 % de TVA, même si vous n’avez pas payé de TVA à la compagnie d’assurances.
S’il s’agit d’une refacturation de frais qui ne s’inscrit pas dans le cadre d’une opération principale, les frais suivent alors leur propre régime TVA. Autrement dit, vous êtes censé avoir reçu et fourni les services ou livraisons sur lesquel(le)s portent ces frais (art. 13, §2, et 20, §1er, CTVA).
Exemple : les sociétés A et B sont copropriétaires d’un entrepôt. A a conclu une assurance incendie pour cet entrepôt et refacture une partie de la prime à B. La refacturation de cette prime se fait sans imputation de la TVA, vu que les opérations d’assurance en sont exemptées (art. 44, §3, 4°, CTVA).
B. Quid de la limitation de la déduction pour les frais de voiture ?
La TVA sur les frais de voiture peut être déduite pour 50 % maximum (art. 45, §2, CTVA). Concrètement, cela signifie que :
· si l’usage professionnel de votre voiture est de 50 % ou plus, votre déduction de TVA est limitée à 50 %, vu que c’est le maximum légal ;
· si l’usage professionnel de votre voiture est de moins de 50 %, votre déduction de TVA est limitée à l’usage professionnel.
Pour déterminer l’usage professionnel d’une voiture, il y a les trois fameuses méthodes de l’administration : le registre détaillé des trajets, la formule semi-forfaitaire sur la base du trajet domicile-lieu de travail et le forfait fixe de 35 %.
Lorsque des frais de voiture sont refacturés, se pose la question de savoir qui est confronté à la limitation de la déduction : celui qui refacture les frais, celui à qui les frais sont refacturés ou les deux ? Pour répondre à cette question, il faut faire une distinction selon que les frais sont ou non refacturés dans le cadre d’une opération principale.
II. Refacturation des frais de voiture
A. Les frais de voiture sont refacturés dans le cadre d’une opération principale
Prenons un exemple. Un consultant doit donner un conseil à un client. Pour cela, il facture des honoraires de 900 € HTVA. Il facture en outre les frais de déplacement pour un montant de 100 € HTVA. Le montant total de la facture est donc de 1 000 € HTVA.
Les frais de voiture refacturés suivent le régime TVA de l’opération principale. Cela signifie que, sur le montant total de 1 000 €, le consultant doit en principe facturer 21 % de TVA.
La TVA facturée peut être entièrement déduite par le client, selon les règles normales de déduction. Autrement dit, il ne doit pas limiter la déduction de TVA sur les frais de voiture refacturés. Si les frais de voiture sont refacturés dans le cadre d’une opération principale, la limitation de la déduction ne s’applique que dans le chef de celui qui refacture, et non dans le chef de celui à qui l’on refacture.
Peu importe que ces frais soient imputés sur une même facture, conjointement à l’opération principale, ou qu’une seconde facture distincte soit émise pour ces frais.
B. Refacturation de frais de voiture sans opération principale
L’entreprise A a conclu un contrat de leasing pour un parc automobile avec une société de leasing X. Une partie des frais de leasing est refacturée par A à la société sœur B, car une partie des voitures prises en leasing est aussi utilisée par des membres du personnel ou des administrateurs de B.
Les frais de voiture refacturés suivent leur propre régime TVA. Cela signifie qu’il faut en principe facturer 21 % de TVA sur ceux-ci.
Selon le ministre, la limitation de la déduction est applicable tant dans le chef de celui qui refacture que dans le chef de celui à qui l’on refacture (QP n° 1832, Vermeersch, 09.01.2024). Dans notre exemple, la limitation de la déduction sera donc applicable tant dans le chef de A que dans celui de B.
Peu importe que les frais de voiture soient refacturés avec ou sans supplément. Peu importe également qu’ils soient refacturés à une entreprise liée ou non. Une double limitation de la déduction devra être appliquée.
Il y aura seulement une limitation de la déduction dans le dernier maillon de la chaîne, c.-à-d. dans le chef de celui à qui les frais sont refacturés – et non dans le chef de celui qui refacture – s’il s’agit de voitures données en location par un assujetti à la TVA dont l’activité économique consiste en la location de voitures (art. 45, §2, al. 2, i, CTVA).
Afin qu’il puisse être question de l’exercice d’une activité économique de location de voitures, les conditions suivantes doivent être remplies :
· l’activité de location doit être destinée au public, ce qui ne demande pas nécessairement de faire de la publicité ;
· l’activité de location est régulière, et donc non occasionnelle.
Il n’est pas exigé que la location de voitures soit la seule activité ou l’activité principale de l’assujetti. Il n’est pas non plus requis que les voitures soient proposées à la location à une clientèle illimitée (autrement dit, à tout le monde).
En revanche, la limitation de la déduction est applicable si l’assujetti se limite à la location de voitures à des administrateurs, membres du personnel et actionnaires (déc. E.T. 113.611, 07.11.2007).
En cas de mise à disposition (gratuite ou non) de véhicules de remplacement par un garagiste à un client en attendant la réparation ou l’entretien de sa voiture ou la livraison d’une nouvelle voiture, il n’y aura pas non plus de limitation de la déduction dans le chef du garagiste. Seul le client devra, le cas échéant, limiter la déduction de TVA.